Le riche et le pauvre selon le plan de Dieu

« Le riche et le pauvre se rencontrent: c’est l’Eternel qui les a faits l’un et l’autre » (Pr. 22:2)

Le riche et le pauvre se rencontrent dans ce monde ; ils vivent l’un près de l’autre. Dieu l’a voulu ainsi. Pourquoi ?

Dans la pensée économique et sociale de Jean Calvin[1], selon le dessein de Dieu, les biens matériel pour la vie présente expriment sa grâce générale et doivent être répandus sur tous les hommes sans exception. Le lien d’amour que Dieu a primitivement établi entre tous les membres de l’humanité doit provoquer une circulation ininterrompue des richesses allant des uns vers les autres. Les biens de ce monde sont destinés à être utilisés pour l’entretien de la vie de toute l’humanité. Si les créatures de Dieu  suivaient donc de leur plein gré, les lois de leur créateur, il y aurait une répartition spontanée et naturelle de ces biens entre tous les hommes. Il y aurait une correspondance exacte entre les richesses de ce monde et les grâces divines qu’elles figurent, tous en seraient également bénéficiaires. Mais le péché est là, qui détruit l’harmonie économique de la création. Par la paresse, l’égoïsme, l’avarice et la cupidité, il désorganise la vie de la société. L’accaparement des richesses fait place à la juste distribution des biens entre tous les hommes.

L’exemple le plus illustre d’une juste répartition des richesses personnelles entre tous les hommes nous est donné par l’histoire de la manne dans le désert.

Quand cette rosée fut dissipée, il y avait à la surface du désert quelque chose de menu comme des grains, quelque chose de menu comme la gelée blanche sur la terre. Les enfants d’Israël regardèrent et ils se dirent l’un à l’autre : Qu’est-ce que cela ? car ils ne savaient pas ce que c’était. Moïse leur dit : C’est le pain que L’Eternel vous donne pour nourriture. Voici ce que l’Eternel a ordonné: Que chacun de vous en ramasse ce qu’il faut pour sa nourriture, un omer par tête, suivant le nombre de vos personnes ; chacun en prendra pour ceux qui sont dans sa tente. Les Israélites firent ainsi ; et ils en ramassèrent les uns plus, les autres moins. On mesurait ensuite avec l’omer ; celui qui avait ramassé plus n’avait rien de trop, et celui qui avait ramassé moins n’en manquait pas. Chacun ramassait ce qu’il fallait pour sa nourriture. (Ex 16.14-18)

En conséquence de cette fonction que Dieu assigne aux richesses, signe de sa grâce, destinées à pourvoir à l’existence matérielle de tous, il y a pour chacun dans le mécanisme économique de la société, des responsabilités différentes. Les riches, ceux à qui Dieu confie en dépôt des biens collectifs en surcroît, sont chargés d’être les dispensateurs de Dieu auprès de ceux qui en ont moins. Les pauvres, ceux auxquels Dieu ne donne pas immédiatement les biens de la vie en suffisance, doivent en recevoir leur part précisément par l’intermédiaire des riches, ceux-ci étant par la volonté de Dieu, les obligés des pauvres. Les riches sont appelés par Calvin les ministres des pauvres, chargés de subvenir aux besoins des nécessiteux.

Calvin fait remarquer que la Bible ne donne jamais de point de repère quantitatif permettant d’établir qui est riche et qui est pauvre. Il s’agit toujours de renvoyer l’homme à sa relation vivante avec Dieu, en face de qui il prend la responsabilité de l’usage de ses biens, et s’interroge pour savoir dans quelle mesure il est redevable à celui qui est plus pauvre que lui-même. Il précise que l’on est toujours, d’une façon ou d’une autre, le riche de quelqu’un.

Il est important de noter que dans la théologie réformée, le don du riche est un don gratuit, découlant de sa foi et sans mérite pour le salut de sa personne. En fait, l’homme qui vit dans l’obéissance de Dieu ne fait que donner à son prochain ce qu’il reconnaît lui avoir été confié à cette fin par son Maître. Dieu ne donne donc pas à l’homme les biens matériels pour qu’il en dispose égoïstement, mais pour qu’il les communique à ceux à qui ils sont destinés. Ainsi, en aucun cas l’enrichissement personnel ne constitue le but de sa vie, mais devient légitime lorsqu’il est conçu comme moyen de servir dans l’obéissance à Dieu.

Recommande aux riches du présent siècle de ne pas être orgueilleux, et de ne pas mettre leur espérance dans des richesses incertaines, mais de la mettre en Dieu, qui nous donne avec abondance toutes choses pour que nous en jouissions.  Recommande-leur de faire du bien, d’être riches en bonnes œuvres, d’avoir de la libéralité, de la générosité (1Ti 6.17-18).

Dans le pauvre, Dieu lui-même vient à la rencontre de l’homme riche pour éprouver sa foi et sa charité. Ainsi, le pauvre est le ministre de Dieu auprès des hommes, mettant à l’épreuve leur foi et leur obéissance. Car c’est au nombre et au sort des pauvres qu’on juge une société, et c’est à la manière de les accueillir, de les respecter et de les secourir que Dieu juge une personne.

Dieu choisit donc le pauvre pour en faire son messager ici-bas. Par lui, il éprouve la foi des riches, leur rend visite, mesure leur amour. Il a lié son sort au déshérité par l’incarnation de son Fils Jésus-Christ, qui a vécu dans la pauvreté, solidaire de tous les pauvres. C’est pourquoi, aussi, Dieu se constitue le défenseur du pauvre. Toucher au pauvre, lui nuire, augmenter sa misère ou ne pas le secourir, c’est attenter à Dieu lui-même.

Opprimer le pauvre, c’est outrager celui qui l’a fait ; Mais avoir pitié de l’indigent, c’est l’honorer. (Pr. 14:31) ; Celui qui ferme son oreille au cri du pauvre Criera lui-même et n’aura point de réponse (Pr. 21:13)

Dans la théologie réformée, la qualité du pauvre ne lui confère aucun mérite spirituel. Si elle lui offre des conditions favorables à la compréhension du mystère de Dieu qui s’abaisse en Jésus-Christ, elle ne le prémunit pas nécessairement contre la convoitise des richesses, dont seul le Saint-Esprit est capable de le délivrer. Il ne suffit pas d’être pauvre matériellement pour avoir l’esprit de pauvreté que Dieu requiert de tout homme.

Heureux ceux qui reconnaissent leur pauvreté spirituelle, car le royaume des cieux leur appartient! (Mat. 5:3)

 

[1] André Biéler, La pensée économique et sociale de Jean Calvin, éditions Georg Editeur

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